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27/04/2011

Pas vraiment un grand cru

On peut comprendre que la municipalité de St Emilion ait d'autres préoccupations touristiques que le mobilier de sa collégiale (son centre ville historique, ses boutiques de pinard, ses pâtisseries pleines de cannelés...)  mais on aurait quand même aimé en savoir plus sur les oeuvres d'art de qualité très... diverse et dans un état de conservation assez précaire. La base de données patimoine-de-france n'ayant été d'aucun secours, il restait heureusement la bible Le renouveau de la peinture religieuse en France de Bruno Foucart pour découvrir l'auteur d'un grand tableau accroché bien haut dans le transept.

 

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Elève de Picot, Antoine Rivoulon (1810-1864) fit une carrière honorable mais sans brio particulier. Si les tableaux d'histoire dont on a pu voir des illustrations (comme la Mort de Du Guesclin) font preuve d'un académisme un peu sec hérité de son maître, ses différentes compositions religieuses font preuve d'une bien plus intéressante singularité (voir le passionnant article sur la restauration du Christ). Ce St Sébastien commandé par l'état et livré en 1857 reprend assez traditionnellement l'iconographie de St Sébastien soigné par Ste Irène mais dans un cadre et avec des coloris rappelant un peu les scènes de genre italianisante de Schnetz ou Robert. On espère pouvoir lire bientôt la monographie que Th. Zimmer a consacré à ce peintre fort intéressant.

 

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A partir de là, il fut possible de découvrir que l'auteur d'une copie de la Descente de croix de Régnault commandée en 1850 était un certain Chery qui "fut 8 ans professeur de dessin à l'institution Ste-Barbe à Paris". La date étant incompatible avec Philippe Chery (1759-1838), s'agit-il de Louis Chery (1791-après1851) élève de David (peu vraisemblable), d'un autre Louis Chery signalé à l'école des Beaux-Arts en 1844 ou d'une tout autre personne, cela a peu d'importance, d'autant que la qualité de cette copie est bien difficile à évaluer vue la hauteur où elle est accrochée. Mais une telle oeuvre rappelle à quel point Régnault fut un très grand artiste malheureusement un peu oublié de nos jours.

 

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Enfin la nef abrite six oeuvres un peu naïves rappelant à la fois le maniérisme tardif, la peinture flamande et la peinture italienne, dans un état souvent aléatoire mais assez charmantes. Sur le thème de la vie de la vierge, on trouve ainsi la présentation de la vierge au temple, l'annonciation, la vierge et Ste Elisabeth, l'adoration des bergers, l'adoration des mages et la fuite en Egypte (série incomplète ?).

19/04/2011

Ste Catherine de Villeneuve-sur-Lot

De style romano-byzantin, l'église Ste Catherine de Villeneuve-sur-Lot ne renferme malheureusement que quelques rares vitraux et sculptures de l'édifice précédent ou d'autres églises détruites  de la région, les quelques peintures ayant été apparemment déposées au musée de Gajac (où certaines sont parfois visibles). Mais elle dispose de garnds décors de la toute fin du XIX° et du XX° par ces artistes de formation classique oubliés et souvent méprisés de nos jours.

 

Maurice Realier-Dumas (1860 - 1929) est avec André Crochepierre la gloire académique locale. Elève de Gérome, on peut voir de lui au musée de Gajac nombre d'oeuvres légères et charmantes et il s'est attaqué avec cette Théorie de saints à quelques chose de pas évident, ce genre de long cortège (on pense à celui de St Vincent de Paul à Paris par Hippolyte Flandrin) entre les travées du transept étant assez rébarbatif avec ses dizaines de personnages souvent peu marquants.

 

Une vue globale d'une des six séries de Saints :

 

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Quelques Saints parmi les plus réussis :

 

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Gabriel-Antoine Barlangue (1874-1956), originaire également de Villeneuve, fit lui aussi une carrière académique brillante, pleine d'honneurs et de récompenses. Elève de Jean-Paul Laurens et Benjamin Constant pour la peinture, de Jean Patricot, Henri-Emile Lefort et Antonin Delzers pour la gravure, on le trouvera sur le net essentiellement pour... les timbres qu'il a gravé à partir de 1928. Difficile d'être très enthousiasme pour ce cul-de-four représentant le Christ en majesté avec le Tétramorphe rappelant, sans doute pour aller avec le style de l'église, les icônes byzantines. Le Jeune Fille au Kimono que l'on peut voir ici donne cependant envie de découvrir le reste de son oeuvre.

 

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On ne trouve rien par contre sur Henry Lefai que ce soit sur le net ou le Bénézit (du moins la version que j'ai consulté) sinon qu'il fut actif dans la région comme restaurateur et comme peintre (Penne d'Agennais, St Sylvestre, Dausse...). Les Six Ste Catherine de l'hémicycle et la Vierge à l'Enfant en majesté de la chapelle latérale sont assez décoratives avec leurs ornements végétaux et animaux.

 

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17/04/2011

Au passage...

... signalons dans l'église Saint-Etienne de Villeneuve-sur-Lot un tableau sur le même thème que dans le billet d'hier, un Saint François d'Assise remettant la règle du Tiers-Ordre à saint Louis et à sainte Elisabeth de Hongrie signé et daté 1710 par un certain J. Lacam dont on ne sait rien.

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La composition y est beaucoup plus simple et le trait un peu sec (pour le coloris, difficile de juger dans la pénombre...). Si aucune n'est vraiment remarquable, il fut amusant de découvrir ces deux oeuvres sans doute locales avec leurs points de vue différents, preuves de l'importance de la confrérie du Tiers-Ordre à cette époque dans la région, à 24 heures d'intervalle.

16/04/2011

Juste une paire de toiles

Bâtiment gothique peu gracieux (mais disposant d'un joli cloître), Notre-Dame de Marmande ne recèle que très peu de mobilier : on note ainsi seulement une mise au tombeau sculpté et peinte du XVII°, un retable en bois consacré à St Benoit et deux grandes peintures intéressantes pour des raisons bien différentes.

 

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Grande toile anonyme du XVII°, l'Allégorie du Tiers-Ordre de St François présente un thème pas forcément très fréquent dans un faste baroque assez amusant dans lequel l'artiste a donné à St Louis les traits de Louis XIV. Elle est malheureusement accrochée en hauteur avec un éclairage naturel pas facile, ce qui explique en partie la médiocrité de la photo (on pourra en savoir plus et voir une meilleure illustration par ici).

 

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De l'autre côté se trouve une de ces grandes toiles néo-classiques qui furent envoyées par l'état à travers toute la France. Elève de Regnault quasiment oublié de nos jours alors qu'il fut peintre officiel de grandes familles, Joseph Chabord (1786-1848) ne se montre guère à son avantage dans les rares tableaux de lui dont on peut trouver des illustrations sur le net : le Portait équestre de Napoléon à la bataille de Wagram et la Mort de Turenne tué par un boulet de canon, apparemment ses deux oeuvres les plus connues ou quelques portraits passés sur le marché de l'art. Mais ce Saint Benoît ressuscitant le fils du jardinier se montre bien moins sec dans la composition et plus heureux dans le coloris, assez sensible dans sa représentation du miracle et avec une belle trouée sur la droite. Avec la Mise au tombeau de l'église de Vienne, elle montre un peintre religieux tout à fait honorable.

09/04/2011

Notre-Dame de la Croix de Ménilmontant

Bien que n'apparaissant presque jamais dans les guides, les églises néo-romanes et néo-gothiques conservent souvent des œuvres d'art de qualité. Surtout connue pour ses orgues classés, l'église Notre-Dame de La Croix à Paris abrite un ainsi une intéressante série de peintures.

 

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Commençons par les œuvres contemporaines à la construction de l'édifice avec une série de quatre grands tableaux dans la chapelle axiale consacrée à Notre-Dame peints par Jules Louis Machard (1839-1900) et Xavier-Alphonse Monchablon (1835-1907), Visitation, CrucifixionAnnonciation et Assomption. Si l'ouvrage de Bruno Foucart sur Le renouveau de la peinture religieuse en France et l'exposition Les années romantiques ont remis en lumière les grands formats religieux de la période 1820-1860, ceux des peintres pompiers des générations postérieures restent souvent méconnus (et pas toujours dans un excellent état de conservation). Si le coloris est un peu froid et la composition convenue, reconnaissons à ces peintures un métier et un caractère décoratif des plus honorables, en particulier l'Annonciation qui semble porter le souvenir des peintres italiens du XVI°.

 

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Dans le transept, trois grands formats plus anciens, La descente du Christ aux limbes de Pierre Claude François Delorme (1783-1859) et Jésus guérissant les malades de Jean-Pierre Granger (1779-1840), tous deux peints pour N-D de Paris ainsi que La mort de saint Joseph de Jean-Jacques Lagrenée (1739-1821) peint pour Saint-Joseph des Carmes. Si les deux premiers sont fort bien représentés dans les églises parisiennes (à N-D de Lorette par exemple), on les a rarement vu aussi inspirés, Delorme étant ici flamboyant et très proche de son maître Girodet alors que Granger abandonne son néo-classicisme assez stricte et un peu guindé pour une scène vivante et colorée. On a par contre connu Lagrenée plus inspiré (la moitié supérieure est quasi vide) et moins sec même s'il y a de beaux morceaux de peinture dans le groupe de St Joseph.

 

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Enfin des toiles plus modestes d'artistes anonymes ou peu connus ornent les bas-côtés, parmi lesquels Le Martyre d'un pape, seule œuvre connue d'Alexandre Durant et un Le Christ et Marie-Madeleine anonyme.

 

On pourra en savoir plus et voir des illustrations de meilleure qualité par ici.

06/04/2011

Pinacothèque de Paris : 1ère partie - les collections permanentes

Si on ne peut que se réjouir de l'ouverture d'un nouveau "musée" à Paris (même si ce n'est pas ça qui manque...), on peut se poser des questions sur l'ouverture des nouvelles salles de la Pinacothèque de Paris avec ses collections "permanentes" en dépôts plus ou moins long (le Rembrandt est déjà reparti !) par des collectionneurs privés, ses grands noms et sa muséographie "novatrice".

 

Les œuvres ne sont ainsi pas accrochées par écoles ou par siècles mais par des thématiques parfois assez claires (les natures mortes ou assimilés) mais le plus souvent assez obscures. Si la confrontation d'œuvres aussi diverses et hétérogènes pourrait être intéressante, encore faudrait-il que le choix des rapprochements soit un minimum satisfaisant et que la qualité des objets soit au rendez-vous. Or la plupart des grands noms sont représentés par des tableaux de qualité au mieux médiocre (Monet, Pissaro, Renoir, Van Dyck, Delacroix, Tintoret...). Tout juste peut on ressortir un des trois Courbet, La Source ainsi qu'une nature morte de Heda et deux portraits de Nattier et Reynolds dans l'honnête moyenne de ces artistes.

 

Heureusement quelques artistes moins connus sont mieux représentés : un superbe Renard attaquant des volailles de Carstian Luyckx, un original Homme fumant dans une cour de Matthijs Naiveu, un crépusculaire Bergers devant un feu de Leonaert Bramer, un Paysage montagneux avec des canards d'Adrien S Coorte (en photo ici) ou une Beauté romaine de Bouguereau qui nous fait regretter que l'artiste soit présent à Orsay par de grandes compositions et pas par ses peintures plus légères et frivoles. Mais ce sont surtout deux tableaux de caravagesques nordiques qu'on aura admiré : une Femme comptant ses pièces devant une bougie de Mathias Stom et un Groupe de musiciens de Theodor Rombouts, venu (comme beaucoup d'autres) de la Collection Kremer.

 

S'il est fort agréable de pouvoir découvrir des toiles normalement en mains privées, la collection permanente de la Pinacothèque se révèle pour l'instant pour le moins décevante aussi bien par son accrochage que par les œuvres présentées. Une visite ne semble pour l'instant guère indispensable en elle-même, mais comme elle est gratuite si on fait une des deux expositions temporaires, on pourra y jeter un œil dans ce cas-là...

04/04/2011

Cranach et son temps

Version allégée de l'expo du Bozar de Bruxelles, Cranach et son temps a choisi de nous présenter les œuvres par thèmes et le plus souvent possible en les comparant avec certains de ses contemporains qui l'ont influencé ou qu'il a pu influencer (Dürer, Metsys, Lucas de Leyde...). Le point de vue est intéressant : on y voit les liens artistiques entre Flandres, Italie et pays germaniques et comment se fait l'intégration progressive des codes de la Renaissance. Pouvoir par exemple admirer côte à côté des Lucrèce, deux de Cranach, une de Francia et une du Maître du Saint Sang ou des vierges de Cranach, Metsys ou Dürer est fort appréciable. Et les salles sur la réforme ou les « dangers » des femmes sont tout à fait passionnantes. Mais ce choix a un inconvénient : il rend plus difficile la perception des changements stylistiques dans l'art du maître et ne permet pas vraiment de prendre conscience de l'importance de l'atelier (certaines œuvres étant vraiment de qualité moindre).

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S'il fallait trouver un défaut, ce serait sans doute qu'au milieu de nombreuses oeuvres remarquables (La crucifixion, Le martyre de Ste Catherine, La bouche de vérité, Hercule chez Omphale, La mélancolie'...) , la salle des nues, a priori moment majeur de l'exposition, est un peu décevante : trop d'Adam et Eve un peu redondants et pas tous convaincants et peu de représentation des autres thèmes (pour les Trois Grâces, il faudra aller au Louvre...). Mais cela reste un reproche mineur (avec le fait qu'on aurait aimé en avoir un peu plus...) pour une exposition à la scénographie et à l'éclairage impeccables, et où il a été choisi de faire entrer le public au compte-goutte, ce qui permet de ne pas avoir d'attroupements (mais risque de donner des files d'attente considérables les jours d'affluence) et donc de pouvoir aussi bien profiter des œuvres avec un peu de recul ou de tout prêt, pour admirer la finesse des feuillages, des broderies, des boucles blondes comme les paysages aux architectures raffinées ou les détails amusants. Un vrai plaisir !

 

Cranach et son temps. Musée du Luxembourg, juqu'au 23 mai 2011