31/10/2025
Les quais de Libourne
Il peut paraître surprenant de faire un long déplacement pour voir 6 tableaux et 8 photos mais 1. ça valait le coup ; 2. c'est l'occasion de se refaire le musée de Libourne (où on attend maintenant l'accrochage du Guido Reni redécouvert récemment).

Si j'ai peu apprécié l'initiative "100 œuvres qui racontent le climat" du musée d'Orsay et surtout son côté prêter des œuvres sans raison valable, j'ai trouvé que l'idée de présenter autour du tableau prêtée une petite exposition-dossier sur la représentation des quais maritimes et ferroviaires excellente car ce sont des exemples parfaits de comment le paysagiste à la fin du XIXème / début du XXème peut renouveler ses thèmes et se trouver confronter à de nouvelles difficultés de représentation (côté gris et sale, brume industrielle...).
À tout seigneur, tout honneur, commençons par le superbe Les Docks de Cardiff de Lionel Walden venu d'Orsay où il est loin d'être toujours montré malgré les mots très élogieux de l'édito du catalogue. Tableau sombre et poisseux, où l'humidité comme les vapeurs venues de toute part semblent nous coller au corps, il nous fait ressentir à merveille à la fois le vide humain et l'effervescence industrielle.
Les tableaux qui l'accompagnent ont été parfaitement choisi : le petit Guillemet rapidement brossé montre deux rives de la Seine totalement différentes tandis que les militaires de Luigi Loir s'attroupent dans la neige pour attendre le train qu'on ne devine que par sa vapeur. Le port de Bordeaux de Cazaubon se partage entre anciens navires à rames ou à voiles et plus modernes monstres à vapeur tandis que Les quais de Bordeaux d'Alfred Smith montre toute l'animation de la ville le soir venu et les Usines au crépuscule du méconnu Maurice Falliès nous font découvrir les nouveaux quartiers industriels. Tous montrent un monde en mutation mais aussi les nouveaux effets picturaux nécessaires à sa représentation.
A noter qu'un petit catalogue a été publié avec de très belles photos (en particulier des doubles-pages de détails) et de bonnes notices. On regrettera juste que l'article sur le "Paradoxe du paysage industriel" ne soit pas plus beaucoup plus étoffé et illustré. Cela ferait en tout cas un excellent sujet pour une plus grosse exposition !
D'un quai à l'autre, chapelle du Carmel, Libourne, jusqu'au 11 janvier 2026.
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27/10/2025
Sarah Lipska à Meudon
Il y a des musées auxquels on fait confiance même quand le thème de leur nouvelle exposition ne semble pas être pour soi et le petit mais très actif musée d'art et d'histoire de Meudon en fait partie. Et ne m'a comme toujours pas déçu.

Il faut dire que Sarah Lipska, artiste polonaise formée à la sculpture par Xawery Dunikowski, venue s'installer avec la fille qu'elle a eu avec son maître à Paris, où elle commença à travailler pour les costumes et décors des ballets russes, n'est a priori pas ma tasse de thé. Et ce serait mentir de dire que j'ai été emballé par son œuvre "art déco" aux formes souvent trop simplifiées et aux couleurs trop vives pour moi. Mais j'ai été fasciné par le destin étonnant de cette artiste multi-facette, à la fois sculptrice, peintre, styliste et décoratrice ainsi que par la personnalité qui s'exprime dans ses travaux (mention aux bustes sculptés, j'aurais aimé en voir plus).
Et c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai parcouru les petites salles du musée de Meudon à la découverte d'une artiste que je ne connaissais pas et dont l'univers m'a intéressé même si tout ne m'a pas forcément plu. L'exposition passera après au musée Sainte Croix de Poitiers dans une version étendue, on verra si on aura le courage de s'y rendre pour en découvrir plus...
Sarah Lipska (1882-1973), sculptrice, peintre, styliste et décoratrice, musée d'art et d'histoire, Meudon, jusqu'au 22 février 2026.
16:30 Publié dans exposition en région parisienne | Lien permanent | Commentaires (0)
21/10/2025
Madame de Caen
Si on connait très bien certains généreux donateurs de l'Institut de France / Académie des Beaux Arts (Marmottan, Jacquemart-André), on a totalement oublié Anne-Sophie Marchoux, comtesse de Caen ( 1809 - 1870 )(dont on peut admirer le somptueux portrait commandé à Adolphe Yvon) et sa fondation crée par testament dont le but était d'aider les jeunes artistes venant d'avoir le prix de Rome. Si les œuvres acquises par la fondation furent exposées au musée de la comtesse, installé dans le pavillon qui porte aujourd’hui son nom au Palais de l’Institut de France, cela fait maintenant plus de 50 ans que la plupart n'ont pas été montrées.

On ne peut donc que remercier l'Institut, même si c'est pour un temps assez court, de présenter une partie des œuvres de cette collection dans le pavillon qui les a autrefois accueillies. Et il est étonnant de voir à quel point la plupart des lauréats du prix de Rome à partir de 1872 ont été oublié (ou ont totalement changé de style). Parmi ceux ayant laissé un trace, on notera la surprenante et brillante Salomé d'Aimé Morot (ce chef-d’œuvre est LA redécouverte de l'exposition), La Pensée et Le Travail d'Albert Besnard conçus en décor pour le musée de Caen et encore loin des chefs-d’œuvre de l'artiste remis brillamment en valeur il y a quelques années par le Petit Palais ou la Danaé d'André Devambez très très loin de ce que fut par la suite l’œuvre future de l'artiste (lui aussi remis brillamment en valeur par le Petit Palais et le musée de Rennes).
Mais qui connait encore Joseph Wencker, dont la Baigneuse doit tout à la Naissance de Vénus de Cabanel, Alfred Bramtot dont la Léda aurait sans doute fait fureur 20 ans plus tôt, Lucien Doucet mort trop tôt dont la Jeune fille à sa toilette montre un talent pour le pastel incroyable, Victor Guétin dont le En Famille peint en 1908 parait si loin des avant-gardes triomphant à l'époque. Le Prix de Rome était devenu alors si loin des préoccupations artistiques "modernes"... Si l'on ajoute à cela un très bel ensemble de sculptures (somptueuse Cigale de Marqueste) et de dessins d'architectes (Acropole de Marcel Lambert, Restauration de la Villa Médicis de Gaston Redon, Arc de Constantin de Maurice Boutterin), on tient là une exposition à voir à tout prix, d'autant qu'elle est gratuite...
Le musée secret de la comtesse de Caen, Paris, Institut de France, jusqu'au 30 novembre 2025.
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20/10/2025
L'école de Paris
Parfois on va à une exposition un peu à reculons et on a une bonne surprise. Ce fut mon cas au musée de Montmartre pour l'exposition L’École de Paris, Collection Marek Roefler, où je ne me suis rendu que pour l'affiche (superbe Danseuse russe de Tamara de Lempicka, qui n'est d'ailleurs pas toujours rattaché à l'école de Paris) et un peu de curiosité.

Il faut dire que je n'apprécie guère les artistes rattachés à ce courant artistique qui n'est en pas vraiment un, tant il réunit des profils divers n'ayant comme point commun que Paris, l'avant-garde et, pour la plupart, d'être étranger. Ainsi derrière les références Van Gogh et Cézanne, on touche ici un peu à tout au niveau des influences : cubisme, fauvisme, expressionnisme, art déco..., le même artiste montrant souvent des visages très différents au cours du temps.
Mais voilà, il faut reconnaître que la collection réunie par Marek Roefler est incroyable et m'a fait apprécier des œuvres d'auteurs qui, jusqu'ici, ne m'avaient jamais touché, comme la saisissante Maternité de Mela Muter, Les fortifications, Issy-les-Moulineaux de Michel Kikoïne, Paysage de Kérity de Louis Marcoussis, le Paysage très géométrique de Alice Halicka ou le double portrait Zoucha et Louis Tas de Moïse Kisling. Ajoutons à cela deux beaux petits ensembles de Tamara Lempicka (étonnant Coin d'atelier) et Eugène Zak (très beaux portraits dessinés) et on obtient une exposition où tout le monde trouvera son bonheur... et des choses qu'il appréciera moins...
L’École de Paris, Collection Marek Roefler, Paris, musée de Montmartre, jusqu'au 15 février 2026.
21:49 Publié dans exposition à Paris | Lien permanent | Commentaires (0)
04/10/2025
L'autre côté du château de Sceaux
Comme d'autres avant lui, le musée du Domaine départemental de Sceaux propose une exposition sur l'envers du décor : comment s'est crée et amplifiée la collection, quels sont les rôles du musée... Les habitués de ce genre d'exposition n'apprendront pas grand chose de nouveau (à part les particularités de la formation des collections locales) mais c'est toujours l'occasion de découvrir des œuvres de tout genre habituellement cantonnées aux réserves. Et il y a toujours de belles surprises.

Parmi les acquisitions de ces dix dernières années, on note un très beau dessin de Jacques Rigaud préparatoire à une gravure aussi présentée, deux très belles vues prises à Montalais près de Sèvres de la méconnue Lina Jaunez ( 1798 - 1860 ) ou un charmant petit Dunouy. Parmi les œuvres transférées d'autres institutions, un étonnant Pont de Sèvres de l'inconnu Philippe de Séréville ( 1820 - ? ) ou l'encore plus étonnant Transfert des ossements des rois par François Joseph Heim, venus tous les deux de Carnavalet.
On trouvera aussi des œuvres non exposées en salle mais régulièrement prêtées comme les très belles Carrières à Gentilly de Mellé ou l'affreusement réaliste accident de chemin de fer de A. Provost, des aquarelles de Paul Véra, des toiles récemment restaurées (Luce, Drulin, un crépusculaire Chintreuil) et des questions nées du recollement (jolie vue de Gentilly par Charles Jean Forget). Bref n'attendez pas des merveilles mais venez-y pour faire le plein de curiosités...
Trésors et coulisses du Château. Histoire d’une collection, Château de Sceaux, jusqu'au 22 mars 2026.
19:25 Publié dans exposition en région parisienne | Lien permanent | Commentaires (0)
13/09/2025
Revoir Luce
Vu l'endroit où j'ai passé mon enfance, le nom de Maximilien Luce ( 1858 - 1941 ) m'est connu depuis très longtemps même s'il m'a fallu des années avant d'apprécier pleinement son art. Ce fut donc un plaisir de me rendre (plusieurs fois) à la grande exposition que lui consacre le musée Montmartre.

Et autant le dire tout de suite, c'est une grande réussite qui devrait convaincre ceux qui ne le savaient pas que c'est un artiste majeur du courant post-impressionniste. Chrono-thématique comme la plupart des expositions actuelles, elle présente ses proches, sa période à Montmartre, ses vues parisiennes en particulier les travaux dans Paris, le Sud de la France, la Belgique, Londres et pour finir Rolleboise près de Mantes-la-Jolie où il s'est installé à partir de 1917. Il y a des tableaux majeurs dans chaque section mais aussi un bel ensemble de gravures (pas assez de dessins en revanche) et c'est un régal pour les yeux. Deux petits soucis cependant : ce n'est pas réellement une rétrospective, étant comme son titre l'indique tourné vers le paysage, ce qui fait qu'une partie de l’œuvre de Luce est partiellement voire totalement occultée (la Commune, la Grande Guerre...) et elle présente essentiellement des tableaux de sa période divisionniste au détriment de sa deuxième partie de carrière (certes plus inégale). Ce qui ne doit surtout pas vous empêcher d'y courir avant sa fermeture demain.
Heureusement il y a deux façons d'avoir une vision plus complète de l’œuvre de Maximilien Luce. D'abord en se rendant à Montargis où le musée Girodet présente pour la deuxième fois seulement le très bel ensemble qui lui a été légué en 1983. On pourra y admirer quelques peintures, surtout des petits formats tardifs dont une magnifique Sablière à Rolleboise et une Gare de l'Est très représentative de ses tableaux de permissionnaires pendant la guerre de 14 mais aussi un bel ensemble de gravures et surtout de très nombreux dessins montrant toute sa virtuosité pour représenter en quelques traits un portrait (son fils Frédéric, Signac), un travailleur ou un petit paysage, qu'il soit urbain, bucolique ou maritime. Puis en se rendant au musée de l’Hôtel-Dieu à Mantes-la-Jolie où les très nombreuses peintures donnent un panorama bien plus complet (bon, il y a peu d’œuvres purement divisionnistes par contre) du maître. L'occasion de voir des toiles importantes comme Le bon samaritain, Les voleurs de poule, La gare de l'est sous la neige, L'exécution de l'alsacienne ou une des versions de L’exécution de Varlin. Tout cela devrait vous convaincre que Luce est un artiste majeur...
Maximilien Luce, l’instinct du paysage, Paris, musée de Montmartre, jusqu'au 14 septembre 2025.
Maximilien Luce, passager du temps, Montargis, musée Girodet, jusqu'au 12 octobre 2025.
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10/09/2025
Passage à Auvers...
C'est toujours un plaisir de flâner à Auvers-sur-Oise (beaucoup moins de prendre les transports en commun pour s'y rendre depuis Paris...) et de retourner au musée et à l'atelier Daubigny.

Le musée Daubigny consacre ses espaces du premier étage à la présentation d’œuvres animalières de ses collections. S'il y a très majoritairement des œuvres contemporaines (en particulier un gros ensemble de gravures de l'artiste japonais Koji Ikuta d'une superbe technique mais qui m'ont laissé froid), il y a quand même d'intéressantes sculptures et céramiques de la fin du XIX° (malheureusement dans un meuble vitré exigeant de se baisser), deux représentations de chats comme toujours de belle qualité de Steinlen et un étonnant Chat sauvage de Édouard Paul Mérite (1867 - 1941 ) artiste que je ne connaissais pas mais que j'ai désormais très envie de découvrir.
A quelques dizaines de mètres, l'Atelier Daubigny présente lui une petite exposition consacrée à l'atelier et à la peinture en plein air. Si une partie des œuvres sont présentées par des photos ou des copies modernes (mais le lieu peut difficilement faire venir des œuvres de grands musées étrangers...), il y a quand même des choses à voir, comme deux gravures (dont une vue de l'atelier Daubigny) de Léonide Bourges dont je n'avais vu que des peintures jusque là, un bel ensemble de caricatures de Daumier sur les peintres en plein air mais surtout le superbe petit tableau représentant Marie Sophie Daubigny cousant devant la fenêtre. Si le propos reste succinct, l'exposition bien que petite n'en est pas moins intéressante.
Âmes animales, musée Daubigny, Auvers-sur-Oise, jusqu'au 21 septembre 2025.
D'ateliers en paysages, Atelier Daubigny, Auvers-sur-Oise, jusqu'au 2 novembre 2025.
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