06/03/2022
Dernier week-end pour Chéron
Il était bien entendu impossible de faire une rétrospective complète de l'art de Louis Chéron ( 1655 - 1725 ) puisqu'installé à Londres en 1685 après la révocation de l'édit de Nantes, il y peindra essentiellement des grands décors. C'est donc en grande partie par le dessin que le musée des BA de Caen a choisi de nous le présenter. Mais pas que !
On découvre ainsi sa peinture par des études pour Le christ guérissant les malades à la piscine de Béthesda pour l'église San Pantaleone à Venise ainsi que pour Le prophète Agabus prédisant à St Paul ses malheurs pour son May de Notre-Dame de 1687. Et pour la période anglaise une paire de petits panneaux Vénus et Adonis avec La mort d'Adonis, trois étude de plafond autrefois attribué à Thornhill ainsi qu'un grand Zéphyr et Flore redécouvert récemment sur le marché de l'art. On y voit un bel artiste au coloris comme à la composition très sûrs, quelque part entre baroque et classicisme.
Mais ce sont donc ses œuvres sur papier qui sont le mieux représentés et on ne peut être qu'émerveillé par son talent de dessinateur. Que ce soient ses grandes feuilles très finies de la période parisienne, ses dessins préparatoires à des gravures ou ses académies de la période anglaise, il fait preuve d'une grande maîtrise technique comme d'une prodigieuse inventivité. Mention spéciale aux cinq dessins aux sujets tirés des actes des apôtres. Tout cela donne sacrément envie de découvrir ses décors encore en place en Angleterre...
Louis Chéron, l'ambition du dessin parfait, Caen, Musée des Beaux-Arts, jusqu'au 6 mars 2022.
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19/02/2022
Oscar Rex et Napoléon
Trois heures de transport en commun pour aller voir 6 tableaux, cela peut paraître beaucoup... Mais d'une part il n'y aura peut-être pas d'occasion de les revoir avant longtemps, d'autre part le château de Malmaison est un plaisir à revoir, d'autant qu'il y a toujours des petits changements dans l'accrochage permettant de découvrir des œuvres jamais vues, comme La Belle Poule en rade de Jamestown de Duran-Brager ou une nouvelle acquisition comme Le siège de Toulon de François Grenier. Au demeurant l'exposition Malmaison, escale aux terres australes relatant le voyage du capitaine Nicolas Baudin est intéressante historiquement à défaut de l'être pour les pièces présentées.
Mais je suis là pour découvrir l'autrichien Oscar Rex (1857 - 1929 ) dont sont présentées six des œuvres (quatre proviennent des collections du château et mériteraient sans doute d'y être toujours présentées, et deux de collections privées) d'une grand série qu'il a consacrée à Napoléon et montrée à travers l'Europe. Les différents reproductions de tableaux qu'on peut trouver de lui sur le net montre un de ces artistes nombreux à cette période dont la peinture d'histoire tend vers l'anecdote voire la scène de genre et qui accorde une grande importance aux matières, tissues, orfèvrerie...
Et effectivement de Dans le parc de Malmaison à C'est fini, en passant par Napoléon et son fils, inutile de chercher la "grande histoire" ni sans doute même des évènements réels. Mais une tentative de montrer un empereur humain, jouant avec son fils, pestant contre les anglais (Et vous là-bas !), pleurant ses soldats morts abandonnés en terre russe (Le dernier adieu)... Une peinture plus sentimentale qu'historique et peinte avec un pinceau brillant et des couleurs chatoyantes. Au final une jolie découverte et un artiste dont on aimerait voir beaucoup plus...
Oscar Rex, peintre de la légende Napoléonienne, château de Malmaison, jusqu'au 7 mars 2022.
13:05 Publié dans exposition en région parisienne | Lien permanent | Commentaires (0)
13/02/2022
Ca ferme !
Pour un fan des petits maîtres de la peinture du XIX° siècle comme moi, l'exposition au musée du Havre était à voir absolument. Et je n'ai vraiment pas été déçu.
Si Charles Lhullier (1824 - 1898 ) a laissé une petite trace dans l'histoire de l'art, ce n'est pas pour son œuvre mais par les élèves qu'il a eu à l'école des BA du Havre qu'il a réorganisée et dynamisée. La vingtaine de toiles réunies par le musée André Malraux venant essentiellement de ses réserves mais aussi d'autres musées normands et de collections privées montre un artiste avec une solide formation classique. Si les quelques grands formats présentés (Le café des Turcos, Un ordre) souffrent d'un manque total d'audace que ce soit dans la composition comme dans le style, Lhullier se montre bien plus personnel et touchant dans des portraits familiaux ou dans des petits formats de paysages habités de rares silhouettes humaines (A Bléville, Paysage des environs d'Honfleur ou Silhouette de femme cueillant des fleurs dans un champ). Un artiste dont il y a sans doute encore beaucoup à découvrir.
Comme enseignant, Lhullier dut savoir se montrer assez libre et pédagogue car on trouve parmi ses élèves aussi bien un peintre animalier au style très classique comme Georges Frédéric Rötig (représenté par le superbe Lion et lionne à l'affut et des Études de chiens) que des chantres de l'art moderne comme Raoul Dufy et Othon Friesz ; des artistes célébrés en leur temps comme d'autres restés simple amateurs (même doués). On admire ainsi autant un charmant et bucolique Tombeau fleuri au prieuré de Granville de Georges Binet que les scènes de vie modernes La carrière ou La manifestation de Maurice Émile Vieillard ; les lumineuses Barques de pêches de René de Saint-Delis comme le Bassin du commerce au Havre enneigé de Albert Roussat ; l'attelage de chevaux ployant sous L'effort de Raymond Lecourt comme les gens profitant dans un parc de la Détente Hebdomadaire (Vaugirard) de Gaston Prunier... Plein de belles découvertes !
A l'école de Charles Lhullier, musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, jusqu'au 13 février.
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16/01/2022
Dans l'atelier de Roybet
Si l'exposition Dans l'atelier de Ferdinand Roybet n'est qu'une exposition dossier sur deux petites salles (accompagnée de changements dans l'accrochage des autres salles), elle permet néanmoins aux habitués du musée de Courbevoie de se faire une idée un peu plus précise, en présentant des peintures et dessins que je n'y avais jamais vu accrochés jusqu'ici, d'un artiste célèbre en son temps dont on se prend à rêver d'une grande rétrospective un jour.
On découvre ainsi des œuvres de ses années de formation à Lyon (Le petit savoyard, La jeune fermière), de son séjour en Algérie (Femme d'orient dans son intérieur et plusieurs dessins), un somptueux Gentilhomme à la cape verte et à la rapière (portrait du graveur Charles Waltner), des gravures et un bel ensemble dessins où Roybet se montre grand dessinateur aussi bien au fusain (très beau Portrait d'homme), à la pierre noire (Charles Waltner), au crayon graphite (Le joueur d'échecs) qu'au lavis (Scène de joueur, Luthier sans son atelier).
Dans les autres salles, parmi les œuvres que je n'avais jamais vu dans mes passages précédents au musée, on note un Courbevoie pendant les inondations de 1910 de Auguste Durst, artiste grandement oublié sur lequel on en découvrira plus ici, un curieux Retour des cendres de Napoléon Ier à Courbevoie par François Fortuné Antoine Ferogio, la très symboliste Semeuse d'étoiles de Consuelo Fould ou le Masque mortuaire de Carpeaux par Jean Marie Rollion. Comme toujours une visite au musée Roybet-Fould de Courbevoie est une grande source de découvertes...
Dans l'atelier de Ferdinand Roybet, Courbevoie, musée Roybet-Fould, jusqu'au 30 juin 2022.
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31/12/2021
Les réserves de nos musées ont du talent
L'un dans l'Eure, l'autre dans l'Oise, deux de nos "petits" musées de province / banlieue présentent des expositions avec des œuvres sorties de leurs réserves. Et ce sont de grandes réussites.
Le musée de Vernon nous présente donc des paysages d'"ici" confrontés à des œuvres d'"ailleurs" (armes venues d'Afrique, gravure d'objets asiatiques). Si certaines œuvres ont déjà été vues car parfois accrochées aux cimaises des collections permanentes (l'étonnante Marine de Charles Lacoste, le très beau Paysage à marée basse de Karl Daubigny ou la magnifique Route dans la montagne de Rosa Bonheur) d'autres sont pour moi inédites. Une série de petites esquisses sur le mont St Michel de Louise-Denise Damasse, des aquarelles à la composition originale de Arthur Bourdillat et Roger Reboussin, une Montagne de Paul Jouve surtout connu comme peintre animalier, une Tête d'homme de l'orientaliste Eugene Girardet ou une charmante petite huile Sur la plage en Bretagne de Adolphe Ernest Gumery... Et l'exposition est surtout l'occasion de voir une grosse partie des fonds Georges Paul Leroux et Paul Jouanny que possède le musée (qui présente souvent une ou deux œuvres de chaque artiste). Célèbre comme décorateur de son vivant, le premier se montre un paysagiste sensible et ses vues de carrières sont étonnantes. Très méconnu mais présent régulièrement ces derrières années dans les expositions sur les vues de la Seine, le deuxième est un paysagiste qui mérite vraiment d'être redécouvert aussi bien pour ses vues d'Île-de-France que du sud de la France.
Le musée de Pontoise a lui sorti de ses réserves les carnets de Ludovic-Rodo Pissarro le quatrième fils de Camille Pissaro. Certains sont présentés dans des vitrines tandis que les murs sont ornés de différentes aquarelles. Vues de Bretagne, de Normandie, de Paris, de Pontoise, du sud de la France, d'Angleterre mais aussi croquis des élégantes et de la vie parisienne, caricatures familiales... les thèmes sont aussi variés que les techniques (crayon, encre, aquarelle...). Rodo fait preuve d'une grande sensibilité pour saisir le pittoresque de la ville ou le calme de la nature ainsi que d'un sens aigu pour croquer les travers de la société (et de ses proches). Une magnifique découverte qui donne envie d'en savoir plus sur un des moins connus des fils Pissaro. Si le catalogue est très bien illustré (on peut voir notamment d'autres dessins de certains carnets), il est malheureusement très pauvre en essais...
Ici et ailleurs, voyages à travers les collections du musée de Vernon, musée de Vernon, jusqu’au 9 janvier 2022
Les Carnets de dessin de Ludovic-Rodo Pissarro, musée Pissaro, Pontoise, jusqu'au 24 février 2022
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26/12/2021
L'orientalisme à Nemours
Comme l'avait montré la médiocre exposition L'Orient des peintres au musée Marmottan il y a deux ans, faire une exposition généraliste sur un thème aussi vaste aussi bien dans ses sujets, dans le style des artistes que dans sa période temporelle que l'Orientalisme est une gageure. Pari pourtant parfaitement réussi par le château-musée de Nemours.
Ne pas chercher l'exhaustivité mais ouvrir des pistes ; ne pas vouloir montrer de chef d’œuvres mais des œuvres marquantes et rares ; montrer des œuvres peu vues de grands maîtres et d'autres de maîtres peu souvent vus ; ne pas sombrer dans le cliché de l'orientalisme du cliché (très petite section sur harem et odalisque) pour privilégier les artistes ayant eu une vraie affection pour leur découverte de l'Orient ; l'exposition ne fait aucune faute de goût. Et si aucune des sections (campagne d’Égypte, découverte de l'Algérie, scènes de vie quotidienne, animaux...) ne peut bien entendu être très développée, la présence de deux d'entre elles sur Orientalisme et peinture d'histoire / religieuse (avec l'extraordinaire Ismaël de Virginie Demont-Breton) ainsi que le portrait orientaliste (magnifique Mendiant aveugle de Paul Leroy) donne envie que des musées consacrent de vraies expositions à ces deux thèmes.
Si Ingres, Gérôme et Delacroix ne sont représentés que par une gravure et Decamps par un dessin, on découvre deux peintures de Girodet et des œuvres peu vues d'orientalistes aussi importants que Fromentin, Tournemine, Ziem, Dinet, Bergère, Marilhat, Landelle, Léon Belly ou Bouchor. Parmi les belles surprises, deux charmants et colorés Alexis Auguste Delahogue jamais vus jusqu'ici au musée de Melun, un très moderne dans sa facture Gardien de la mosquée de Charles Dagnac-Rivière (jusqu'ici pour moi inconnu) qui contraste avec la très académique Suleika femme du Caire de Louis Édouard Fournier, les belles du harem d'Alfred Chataud très éloigné du voyeurisme habituel de ce genre de scène, une superbe aquarelle du port d'Alger de l'anglais William Wyld ainsi qu'un très bel ensemble du peintre nemourien (il fut conservateur du musée et un artiste à succès) Ernest Marché qui fait preuve d'une grande sensibilité dans ses paysages.
Bref, je ne peux que conseiller aux parisiens l'heure de train pour se rendre à Nemours...
Rêve d'Orient, château-musée de Nemours, jusqu'au au dimanche 27 mars 2022.
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23/12/2021
Napoléon à Fontainebleau
Parmi les très nombreuses expositions consacrées à Napoléon pour le 200ème anniversaire de sa mort, il y a eu de tout : de l’indispensable (Invalides et Gobelins), du tape-à-l’œil insupportable (La Villette), du très spécialisé franchement austère (la Monnaie)... Celle que lui consacre le château de Fontainebleau est fort intéressante mais laisse un peu sur sa faim : il faudra sans doute lire le catalogue pour en savoir vraiment plus sur la présence de l'empereur et les aménagements qu'il a pu y faire faire.
Après une version du portrait en costume de sacre par Robert Lefevre, on découvre donc différents projets (réalisés ou non ) des architectes Fontaine, Percier et Hurtault afin de transformer le château pour les besoins et les gouts de l'empereur, des meubles et des peintures qui y ont été installé... Si les dessins d'architectures sont splendides, il y a peu d’œuvres vraiment marquantes dans l'exposition. On notera la série d'aquarelles de ou d'après Giuseppe Pietro Bagetti représentant la campagne d'Italie, les quatre allégories d'Antoine François Callet, le Triomphe de Galatée de François Van Loo ou les 12 esquisses pour le décor de la voûte de la galerie de Diane par Jean Baptiste Debret.
Et puis il ne faut surtout pas oublier au tout début de la visite du château d'aller voir la petite salle consacrée aux chiens de Louis XV par Jean Baptiste Oudry (qui complète bien la visite de l'exposition sur les animaux du roi à Versailles) qui présente au milieu du superbe Cadet et Hermine acquis récemment par le château les cinq autres tableaux de la série que possède Fontainebleau. Un régal !
Un palais pour l'Empereur. Napoléon 1er au château de Fontainebleau, château de Fontainebleau, jusqu'au 3 janvier 2022
17:05 Publié dans exposition en région parisienne | Lien permanent | Commentaires (0)